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Musique

Kamaru : de génération en génération

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Joseph Kamaru : Un même nom pour deux musiciens. Le premier fut l’une des figures de la musique kenyane dès l’indépendance, le second -son petit fils- suit les chemin de l’ambiant electro et valorise l’héritage légué par son ancêtre.

C’est l’histoire de deux Joseph Kamaru. Le premier est un géant du folklore, de l’histoire et de la politique kényans : franc et festif, énergique et direct. Le second, un pionnier de l’électronique « ambiant » : réservé et délicat, modeste et réfléchi. Les deux sont liés par le nom et le sang, mais une génération les sépare, et c’est à cet écart que l’on doit leurs différences de sensibilité, de rapport au monde et de façon d’utiliser la technologie. Alors que Joseph senior travaillait sur les proverbes kikuyus et jouait du haut des pupitres des campagnes électorales, KMRU (le surnom de Joseph le jeune, que nous utiliserons pour des raisons de commodité) est habile dans l’utilisation des stations audio-numériques et le maniement des échantillons sonores, autant de talents développés en parallèle de ses études, puis de sa carrière d’enseignant.

Malgré leurs différences, la main silencieuse du destin les a rapprochés, chacun incarnant une face différente de la même pièce musicale. Il y avait une « connexion intrinsèque », raconte KMRU, « et je pense que c’est parce que j’ai été directement nommé en référence à Joseph Kamaru ». Cela coulait donc de source : avec KMRU, nous avons abordé sa relation avec son défunt grand-père, avec cette question en tête : comment le jeune homme voit l’héritage de son aïeul, à l’heure où il travaille à rééditer sa musique pour la faire connaître au monde entier?

Gucokia rui mukaro (ramener la rivière à son cours)

« Quand j’étais au lycée et peut-être même déjà à l’école primaire, lorsque je prononçais le nom de Kamaru, les gens me demandaient si j’étais lié au « Kamaru »  raconte KMRU en visio depuis son logement étudiant à Berlin. « Je ne savais pas qu’il était célèbre. Je le connaissais juste comme mon grand-père. Cela m’a fait prendre conscience qu’il était quelqu’un d’important et que je devrais envisager de lui parler davantage pour mieux connaître son travail. »

« Le » Joseph Kamaru, décédé en 2018, était le chanteur folk le plus connu du Kenya.  En combinant le benga, le jazz et la musique soukous congolaise avec des proverbes kikuyu (l’un des plus grands groupes ethniques du pays), Joseph Kamaru a écrit des chansons remarquables qui ont dépassé le cercle des élites politiques pour transmettre au plus grand nombre leur commentaire sur l’état de la société, dans un Kenya post-colonial. Ayant grandi dans une famille de la classe ouvrière, Kamaru est entré dans l’esprit du public avec son single de 1966 « Darling ya mwalimu », qui raconte l’histoire d’une jeune fille abusée sexuellement par son professeur. Après la sortie de la chanson, le syndicat national kenyan des enseignants (KNUT) a appelé à une grève nationale, suscitant un débat parlementaire et nécessitant même l’intervention du président Kenyatta. 

Ngemi Naai-Hi – Joseph Kamaru

Le talent de Kamaru pour soulever le débat, quand ce n’est pas la polémique, a perduré au fil des ans, n’hésitant pas à toucher les sujets les plus tabous tels que la corruption, ou encore le viol – comme dans  « Tiga Kuhenia Igoti » (Ne mentez pas au tribunal). Cet autre titre phare du vaste catalogue de Kamaru -qui compte plus de 1 000 chansons, condamne un homme jugé pour viol en faisant entendre la voix de la victime. Il y a aussi son coup d’éclat lors des célébrations du Madaraka Day en 1992, lorsque Joseph a pris le micro devant un stade rempli de monde pour s’adresser directement au président de l’époque, Daniel Arap Moi : « Ne restez pas assis confortablement avec votre fimbo (club). Je sais qu’il y a des gens qui vous disent que vous êtes populaire, mais la vérité est que les gens ne vous aiment pas. »

Joseph le senior n’était pas seulement un franc-tireur du fait de son discours audacieux, mais aussi pour son don de combiner la musique benga avec la guitare sauce congolaise, et le swag folky de son homologue américain Jim Reeves. Les chansons sont tantôt funky, tantôt d’humeur balladeuses, et toujours totalement originales. Son art de juxtaposer les sons et de se jouer des genres a interpellé  une nouvelle génération d’artistes qui échantillonnent sa musique pour en faire des morceaux dans des genres nouveaux, ou la mixent dans des DJ sets. « Il y en a une, et je crois que c’est l’une des chansons les plus jouées de mon grand-père, qui s’appelle « Mukukaranake » », se souvient KMRU. « Je l’ai entendue jouée dans le cadre d’un festival à Nairobi où elle était mélangée avec « This is America » (Childish Gambino). Il y avait ces deux DJ qui jouaient, et c’est aussi le morceau qui a été utilisé dans la publicité Nike. C’est un genre de musique funk plus entraînante. Je pense qu’elle vient de son premier disque ». 

Source www.pan-african-music.com

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