Cette semaine, Mahalia évoque la complexité des anciennes relations amoureuses, les Buruklyn Boyz adaptent leur répertoire, Kwaku DMC adopte une approche minimaliste de la drill, Shabaka propose une méditation guidée par son jazz expérimental et Alune Wade raconte la vie de sultan.
Letter to Ur Ex
Mahalia
La chanteuse britannique d’origine jamaïcaine dévoile un nouvel EP de cinq titres dans lequel elle évoque la complexité des relations que les gens entretiennent avec leurs anciens partenaires. Mahalia partage ses sentiments ambivalents dans Letter to Ur Ex. Sa voix bouleversante lui permet de transmettre son message déchirant. Il s’agit d’une œuvre intime comme l’explique Mahalia : « J’ai écrit Letter To Ur Ex le matin après que moi et mon copain ayons eu une horrible dispute à cause d’un texto envoyé par son ex la nuit précédente ». La chanteuse du Leicestershire y fait bon usage de mélodies douces et des riffs de guitare discrets pour mettre en valeur sa puissance vocale. Letter To Ur Ex est dans la lignée de ses précédents titres d’inspiration soul RnB à écouter quand on se sent un peu patraque.
EAST MPAKA LONDON
Buruklyn Boyz
Les Buruklyn Boyz montrent un côté plus doux (de la drill de leurs débuts) dans EAST MPAKA LONDON. Mpaka fait référence au nom d’une rue qui traverse le quartier de Buruburu où les Buruklyn Boyz ont fait leurs débuts. Certains morceaux comme « CONFESSION » (tout en majuscules) possèdent cette touche plus brute de drill, mais la majeure partie du projet adopte une mélodie plus douce aux influences RnB, comme dans « NISKIZE » avec la chanteuse Maya Amola ou dans « NOTHING BUT LOVE ». Les seize titres s’enchaînent très bien et on peine même parfois à distinguer où commence et où termine chaque titre : preuve que l’album est cohérent, chose rare pour un premier disque. Maintenant, c’est aux leaders de la scène drill et rap kényane de décider de l’évolution du style. Se dirigera-t-on vers des basses lourdes et une reprise des codes des gang façon Royaume-Uni ? Ou verra-t-on venir un style plus groovy propre au RnB ? C’est au Burukulyn Boyz qu’appartient ce choix.
Road to the Jungle
Kwaku DLC
Kwaku DMC, un des pionniers de la culture Kumerica, vient de sortir son troisième album dans lequel il s’éloigne de la trap house pour se rapprocher de la jungle. En adoptant une approche minimaliste de l’esthétique du drill, Kwaku se focalise sur sa voix et son flow pour créer sa propre marque d’Asakaa qui lui a permis d’obtenir le soutien local en tant que figure de proue de cette scène naissante. Sur Road to the Jungle, on retrouve ses compatriotes de Kumerica, tels qu’O’kenneth et Reggie sur « Agree ». Dans le titre, on entend le groupe crier « Asakaa » dans l’ouverture aérienne. Il y a aussi quelques nouveaux venus sur « Allah ». Kwaku tend ainsi le micro à Xzone, Thywill et Maswud JR qu’on ne retrouve pas encore sur les plateformes de streaming. Road to the Jungle témoigne des aptitudes et des compétences de Kwaku DMC en tant que rappeur majeur de la scène ghanéenne.
Afrikan Culture
Shabaka Hutchings
Shabaka Hutchings revient avec un nouvel EP solo, Afrikan Culture. Un disque assez éloigné de ce que l’artiste a pu produire jusqu’ici avec les Sons of Kemet ou Shabaka and the Ancestors. Néanmoins, on retrouve dans cet EP le même esprit que dans les précédents projets du virtuose britannique. Un terme qui n’est pas employé à la légère car il convient parfaitement à Shabaka qui est l’unique interprète de tous les instruments de cet EP, dont issus des traditions africaines comme la mbira et la kora. Shabaka a également fait appel aux compétences du producteur et ingénieur son Dilip Harris venu lui prêter main forte. Afrikan Culture a été composé, comme le suggère la chanson titre « Black meditation », pour accompagner la méditation. L’album possède un caractère quasi-mystique avec ces tintement éthérés et la flûte shakuhachi que l’on perçoit tout au long du disque, « une nouvelle technique de création » qui expérimenteShabaka. «J’ai expérimenté la superposition de plusieurs flûtes pour créer une forêt de sons où les mélodies et les rythmes flottent dans l’espace et émergent par instants », poursuit-il.
Sultan
Alune Wade
Le bassiste sénégalais Alune Wade vient de sortir un cinquième album intitulé Sultan. L’artiste y évoque son parcours de musicien nomade. « Brésiliens, New-Yorkais, Nord-Africains, Ethiopiens, Cubains, Français, Autrichiens… j’ai multiplié les rencontres. Plus on avance et plus on grandit musicalement. Tous ceux que j’ai croisés, tout ce que j’ai écouté a nourri ma réflexion », raconte Alune Wade. En effet, le compositeur attachait beaucoup d’importance au fait d’y voir figurer ses anciens collaborateurs tels que le pianiste cubian Harold Lopez-Nuzza, le chanteur marocain Aziz Sahmaoui, les Américains Lenny White et Bobby Rays Spars, le chanteur tunisien Mounir Troudi et la chanteuse mauritanienne Noura Mint Seymali. « Ce disque, c’est finalement la somme de toutes les expériences que j’ai vécues depuis une dizaine d’années”, résume-t-il pour expliquer son choix d’adopter la figure du sultan : « Ce sultan, c’est un homme qui se déplace avec ses connaissances, sa famille, son expérience… »